La CIDH exprime sa préoccupation face à la recrudescence de la violence en Haïti

21 février 2024

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Washington, D.C. - La Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH) exprime sa préoccupation face à l'intensification de la violence en Haïti aux mains des groupes criminels organisés et appelle l'État et la communauté internationale à rechercher des solutions globales et durables pour surmonter la crise humanitaire, politique, sociale et sécuritaire que traverse le pays depuis des décennies.

La Commission reste alarmée par la violence perpétrée par des groupes armés, qui commettent des meurtres, des enlèvements et des viols, entre autres, en particulier dans la capitale, Port-au-Prince. Ce qui précède a un impact spécifique sur les femmes et les filles.

Selon les données les plus récentes publiées par le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), au cours de l'année 2023, plus de 8 400 personnes ont été victimes de la violence des gangs, y compris des personnes tuées, blessées et kidnappées. Cela représente une augmentation de 122 % par rapport à 2022. Plus précisément, Port-au-Prince représentait 83 % des homicides et des blessures enregistrés. Dans le sud de la capitale, les gangs ont mené des attaques à grande échelle pour contrôler certaines zones et continuent à recourir à des pratiques systématiques de violence sexuelle dans les zones sous leur contrôle, en expossant les femmes et les filles au danger.

En particulier, selon un rapport du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), il y a une augmentation des signalements de personnes âgées, de femmes et de filles brutalement violées, torturées et kidnappées par des gangs. Le rapport indique également que la violence sexuelle contre les femmes et les filles est utilisée comme arme de guerre, d'intimidation, de contrôle territorial et de domination dans les zones contrôlées par les gangs. Dans ce contexte, un total de 3 056 cas de viol ont été signalés entre janvier et août 2023, ce qui représente une augmentation de 49 % par rapport à 2022.

En ce qui concerne les causes de cette recrudescence de la violence, la Commission note les graves défis auxquels sont confrontée les institutions de sécurité, y compris la violence contre la police. La crise politique actuelle, qui s'aggrave, a rendu les institutions de l'État inefficaces pour prévenir et répondre à toutes les formes de violence, entraînant l'absence de l'état de droit et le plein fonctionement des institutions de l'État.

Haïti n'a pas eu de dirigeants politiques élus au moins depuis l'assassinat du président Jovenel Moïse le 7 juillet 2021 et l'expiration de tous les mandats du pouvoir législatif le 9 janvier 2023. Cette situation sape l'autorité de l'État et a aggravé les crises politiques, institutionnelles et humanitaires, comme détaillé dans le rapport de la CIDH sur la situation des droits de l'homme. Malgré les efforts déployés pour organiser des élections, comme l'installation du Haut Conseil de transition dans le but de promouvoir un dialogue inclusif et d'organiser des élections transparentes, les élections présidentielles et législatives sont toujours en attente. Ce contexte d'instabilité politique est agravée par les récentes manifestations exigeant la démission de l'actuel Premier ministre.

La CIDH réitère son appel à des solutions globales et durables à la crise à travers d'un processus de dialogue pacifique et inclusif, d'élections libres et équitables et du renforcement des mécanismes de sécurité. Ces solutions doivent intégrer la protection des droits de l'homme dans une perspective de genre et d'intersectionnalité, le renforcement des institutions démocratiques, la consolidation des institutions chargées de la sécurité des citoyens et le rétablissement de la confiance des citoyens dans les institutions publiques.

La Commission exhorte à nouveau la communauté internationale à soutenir Haïti dans sa recherche de solutions pour surmonter cette crise. Bien que le Conseil de sécurité des Nations Unies ait autorisé la création de la Mission multinationale d'appui à la sécurité en Haïti par la résolution n° 2699 du 2 octobre 2023, la CIDH observe qu'il existe des défis concernant sa mise en œuvre effective. En particulier, un tribunal kenyan a récemment rendu une décision qui empêche le gouvernement de déployer des policiers pour opérer en Haïti.

À la lumière de ces défis, la CIDH réitère son appel à la communauté internationale, en particulier aux États de la région et aux agences du système régional -et universelen respectant de la souveraineté et de l'autodétermination d'Haïti- à rechercher les mécanismes les plus efficaces et les plus participatifs pour adopter des mesures capables de concrétiser les principes de solidarité et de coopération à tous les stades de l'identification, l'élaboration et la mise en œuvre d'actions de développement et d'assistance, y compris une aide alimentaire et humanitaire accrue, en travaillant main dans la main avec le pays. Ces mécanismes devraient également se concentrer sur la construction, l'appui et le renforcement des capacités institutionnelles, des réseaux de la société civile et des politiques publiques, qui sont essentiels pour élever les normes de protection dans l'État haïtien.

La CIDH est un organe principal et autonome de l'Organisation des États Américains (OEA), dont le mandat émane de la Charte de l'OEA et de la Convention américaine relative aux droits de l'homme. La Commission interaméricaine a pour mandat de promouvoir le respect et la défense des droits de l'homme et de servir, dans ce domaine, d'organe consultatif de l'OEA. La CIDH est composée de sept membres indépendants, élus à titre personnel par l'Assemblée générale de l'OEA et ne représentent pas leur pays d'origine ou de résidence.

No. 039/24

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