Communiqué de presse

La CIDH exprime sa préoccupation quant à l’aggravation de la violence et de la pénurie en Haïti et annonce la création de la Cellule de coordination et de riposte opportune et intégrée (SACROI) pour faire le suivi de la situation

27 février 2019

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Washington, D.C. - La Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) exprime sa profonde préoccupation quant à l’aggravation de la situation de violence et de pénurie en Haïti. La CIDH appelle l’État à respecter les manifestations et l’exhorte à entamer un dialogue avec tous les acteurs concernés pour rechercher une issue pacifique à la grave crise politique et économique que traverse le pays. En réponse à ces graves événements, la CIDH a décidé de créer la Cellule de coordination et de riposte opportune et intégrée (SACROI) pour effectuer le suivi et le traitement de la situation des droits de la personne en Haïti.

La CIDH observe les événements et le recours à la force qui ont commencé le 7 février en Haïti. Les manifestations contre la corruption et la situation économique ont donné lieu à divers événements tels que les barricades de rues, d'avenues et d’autoroutes, la violence à l’égard de manifestants, les tirs sporadiques, les détentions de personnes, des difficultés dans l’approvisionnement en biens et services essentiels pour l'alimentation, l’eau potable et la santé, la pénurie de carburant, de gaz et de courant électrique, l’arrêt partiel et/ou total des activités économiques, la fermeture des écoles et des bureaux de douanes et d’aéroports, ainsi qu’un impact grave sur le fonctionnement des services publics. En conséquence des faits précités, au moins 26 personnes ont trouvé la mort et plus de 77 personnes ont été blessées, selon les informations de l’UNICEF.

La CIDH constate que pour répondre à la grave situation dans laquelle se trouve le pays, le 16 février, le Président Jovenel Moïse a adopté 9 mesures d’urgence : des coupes budgétaires pour le bureau du Premier ministre de 30 % ainsi que l’élimination des privilèges dont bénéficient les hauts fonctionnaires de l’État ; un audit des entreprises autonomes de l’État par la Cour supérieure des comptes ; la récupération d’au moins 50 % des pertes économiques aux niveaux des douanes et des frontières en raison de la contrebande de marchandises ; l’élimination des monopoles ; l’amélioration des conditions salariales pour les ouvriers de l’industrie manufacturière ; la récupération des fonds perdus par le dossier PetroCaribe par le biais de la désignation d’un nouveau directeur de l’Unité centrale de renseignements financiers et d’un nouveau directeur de l’Unité de lutte contre la corruption, une action rapide de la part de la commission gouvernementale chargée du dossier et un rapport de la Cour supérieure des comptes, la désignation par le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire de nouveaux juges chargés d’instruire le dossier PetroCaribe ; la création et le fonctionnement du Conseil d’administration ; la mise en œuvre des fonds de développement industriel pour renforcer l’économie et l’accès au crédit, enfin, la diminution des prix des produits de première nécessité.

Face à la persistance de la violence et des manifestations en Haïti, la CIDH appelle l’État à respecter l’exercice de la protestation sociale, qui figure parmi les manifestations de l’exercice du droit de réunion et de la liberté d'expression qui revêt un intérêt social fondamental pour garantir le bon fonctionnement du système démocratique et qui ne saurait être considérée comme une menace à l’ordre public. De même, elle appelle l’État haïtien à garantir, lors des mobilisations sociales qui se déroulent dans le cadre de l’exercice du droit de réunion et de manifestation pacifique, la protection du droit à la vie, à l’intégrité de la personne et à la liberté personnelle de tous les manifestants.
À cet égard, la Présidente de la CIDH, la Commissaire Esmeralda Arosemena de Troitiño, a déclaré qu’« il est essentiel, en particulier dans la situation que vit le pays aujourd’hui, de disposer de mécanismes de dialogue assurant la paix et la réconciliation, et garants de la vérité, de la justice et de la réparation, qui reviennent de droit aux victimes, surtout les familles qui ont perdu leurs proches ».

À cet effet, la Commissaire Flávia Piovesan, Rapporteuse pour Haïti, a déclaré que « la rapide détérioration de la situation socioéconomique et politique du pays est fortement préoccupante, qui a tourné à la violence et à la pénurie de courant électrique, de carburant, d’oxygène et de médicaments, nécessaires pour fournir les services essentiels d'approvisionnement en eau, produits alimentaires et services de santé. Tout cela entrave la capacité de l’État de garantir la vie, l’intégrité personnelle et la sécurité des personnes et a un impact direct sur leurs conditions de vie, c'est pourquoi l’État doit adopter des mesures pour faciliter l'accès aux services de base et pour la garantie effective de ces droits ».

La CIDH exprime sa solidarité avec les familles des personnes décédées et appelle l’État haïtien à enquêter sur ces décès avec diligence et dans le respect de la légalité de sorte à déterminer les responsabilités et rendre justice. De même, la Commission interaméricaine exhorte toutes les parties à rejeter et cesser toute violence. La CIDH invite instamment les autorités à rechercher une issue à la crise au moyen d’un travail de dialogue pacifique, inclusif et strictement respectueux des droits de la personne.

La Commission est l’un des organes principaux de l’Organisation des États américains (OEA) et agit de manière indépendante. Son mandat est fondé sur la Charte de l’OEA et la Convention américaine relative aux droits de l’homme. La Commission a le mandat de promouvoir le respect des droits humains dans les Amériques et agit comme organe consultatif auprès de l’OEA en la matière. La Commission est composée de sept membres indépendants élus par l’Assemblée générale de l’OEA, à titre personnel et non en représentation de leur pays d’origine ou de résidence.

 

 

No. 046/19